Criminologie à Rennes 2…Une fête n’a pas eu lieu.

En 2015 il avait été programmé par L’Université Rennes 2, une célébration des Cours Publics de Rennes 2. Un changement de président a bousculé alors les priorités et les valeurs, remettant sine die, les moments féconds au cours desquels toute institution fait retour sur elle-même.

Nous pouvions être d’autant plus heureux que nous y participions et que l’existence d’une Criminologie tout à fait particulière, hors des sentiers battus et remâchés, issue aux courants trop sociologie radicale, trop sciences criminelles, trop psy- thérapeutique d’inspiration psychanalytique, idéologique, et à côté des réalités de terrain, des structurations institutionnelles et des changements de conception de métiers, avait inspiré aux opposants, maints guet-apens. Ces traces feront l’objet d’une autre histoire dans le Chapitre des Entretiens Psycho-Criminologiques. Lire la suite

De la psycho-criminologie, une clinique criminologique.

Le 5 mars 2013.

De la psycho-criminologie, une clinique criminologique

Pr L-M Villerbu, Pr émérite, Psychologie-Psycho-Criminologie… et criminologue sdf et sans papier ?

1- De la CRIMINOLOGIE A LA PSYCHO-CRIMINOLOGIE

1-1 Classiquement la CRIMINOLOGIE est l’étude du phénomène criminel i et se décline en analyse des modes de répressions, de ses politiques ( les politiques criminelles), des diagnostics de terrains concernant à la fois auteurs et victimes et les agents chargés de l’exécution des mesures (les formations  et les évaluations tant judiciaires- les sciences criminelles- que  proposant des analyses du psychisme, des régulations sociales- les analyses psycho-psychiatrique et sociales) et , des traitements et ce qui y  affère tant pour les auteurs, les victimes et les agents (suivi, accompagnements, probation, insertion,  et réintégration). Chaque registre d’interpellation du phénomène criminel a donné naissance à des corps de spécialistes identifiés, des territoires disciplinaires, des outils et méthodologies de prévention et de postvention. Il est donc difficile de s’intéresser au phénomène sans avoir dans un même temps pu poser les bases sur lesquelles les évaluations, nécessairement multidimensionnelles, (effectivité et efficacité, critèrisations, etc.) vont se faire et comment, pour qui et pour quoi.

1-2 Comme tout phénomène qui se construit  comme discipline, la criminologie est aussi politique mais ne peut se réduire à une criminologie d’état, sauf à se mettre hors champs disciplinaire et à réduire ses visées scientifiques à une doctrine d’état au lieu de se mettre aux services de ses utopies participatives. Remarquons au passage combien est difficile la situation de centres de recherches qui seraient affiliés à un quelconque ministère de référence qui lui donnerait les œuvres à réaliser et notamment quand un centre penserait tenir de sa seule autorité le droit de procéder à des analyses « libres ». Mais remarquons aussi au passage que dans la mesure où toute recherche est conventionnée comment cet assujettissement prédétermine implicitement les acteurs qui seront choisis (élus et exclus) pour telle ou telle recherche ou formation.

1-3 Pas plus que la personne ne peut se réduire à un acte infractionnel ou non, seul ou en série, l’acte infractionnel  ne peut réduire la personne  à une appartenance, à une typologie des comportements infractionnels dont elle peut être en capacité, par excès ou par défaut. C’est dans la registre pluriel de ses dimensions anthropologiques, somatiques et psychologiques, sociologiques et neuro biologiques de production et d’expressions de régulations infinies que l’on peut alors par hypothèse rechercher ce qui conduit de manière non aléatoire et suivant des opportunités qui demeureront toujours à spécifier, pour quoi et comment une conduite criminelle a fait l’objet d’une option, allons plus loin d’un pari , avec ou sans calcul ! C’est la là la fonction heuristique des théories criminologiques et il appartient à l’épistémologie d’en mettre en contraste les axes d’interprétation.

1-4 Comme le phénomène est un fait de cité la question de la citoyenneté dans sa dimension anthropologique et politique agglomère la quasi totalité des disciplines susceptibles d’en rendre compte, d’en porter et analyser  les utopies(les sciences politiques) d’en dresser des cartes ou des atlas ( la démographie pénale et les observations sur la délinquances), de témoigner des moments historiques traversés (l’histoire) , des principes philosophiques et éthiques qui tendaient à donner une définition de l’homme, du vivant, de l’existence, de la légitimité, etc. La criminologie ne peut à cet effet que se dresser en criminopole.

2- Comment dans ce contexte définir plus particulièrement la PSYCHO- CRIMINOLOGIE ?

Le terme est emprunté à Ferenczi, auteur sans doute le plus proche et plus clairvoyant dans le champ analytique d’une co-conceptualisation de certains acquis freudiens.

2-1 Pour en traduire l’usage que j’en fais et la référence qu’elle constitue, je dirai que c’est la mise en présence  de personnes en détention, au cours des années 1980, suite à toute une série d’analyses menée dans le milieu psychiatrique et institutionnel ( les enfermements), qui m’a incité à reprendre ces analyses dans un autre milieu toujours fermé, la prison, ses acteurs et ses agents et détenus dans leur fonctions et leur quotidien, dans les contraintes à visée sécuritaires, de protections à l’interne ( dans le contexte d’une division on ne peut plus nette des populations) et de protection contre l’extérieur ( l’intrusion de tout ce qui serait transgressifs et interdit). Et au-delà à organiser des travaux de recherches sur les « présences  professionnelles » des différents acteurs du monde judiciaire.

2-2 Au centre de cet essai de définir une nouvelle voie aux sciences humaines cliniques en tenant compte de la spécificité d’une population, des dispositifs et des errements d’une psychologie/psychanalyse/psychiatrie en usage se qualifiant de criminologique ou de criminelle, qui faisaient se succéder leurs contenus sans la moindre intérêt à circonscrire les problématiques en œuvre ; soit que ce soit au titre d’une personnalité criminelle ou délinquante, ou au titre d’un appareil inconscient et de son formulisme, « le confinement dans une scolastique impressionnante ».
C’était l’homme concret1 dans les bricolages qu’il s’inventait qui m’interrogeait. Celui qui s’est heurté à des formes multiples d’empêchements et dont les productions n’étaient jamais,  que ce que l’on nomme soit les troubles de la personnalité2, les troubles du comportement, soit les inventaires comportementaux identifiables dans un traité du droit pénal dont les articles évoluent au fur et à mesure des pressions sociologiques ou technologiques, des économies pénales et des changements de normes ou de valeurs. C’est l’homme en situation s’engendrant des effets de  son histoire qui faisait l’objet de l‘intérêt.

Enfermement qui renvoie aux deux faces par lesquelles on peut en saisir toute les significations : enfermement dans des frontières construites par les hommes pour les hommes en rupture de normes et de valeurs, et enfermement dans des options qui se sont constituées, par réaction en chaine et en boucle) dans des bricolages censés transformer une réalité sensible et douloureuse en une autre plus acceptable, tolérable, autre dans tous les cas, par calcul, désespoir, surmontement et dépassement de soi constitué en illusion.

Ajoutons encore que le passage d’une réalité sociale( les institutions psychiatriques) à une autre réalité sociale( les institutions pénitentiaires, que cela concerne les adultes, les adolescents-mineurs-de-justice, ou les enfants dans leurs divers placements) m’avait contraint à un constat : l’absence de différence de « soins » entre les milieux Psychiatriques et les milieux de Carcéralité, l’absence de renouvellement des outillages méthodologiques ( en termes de traitements, de diagnostics, alors même qu’il était déjà admis que dans les trois quarts des cas la sémiologie psychiatrique n’en avait rien à dire et notamment sur le plan d’une éventuelle dangerosité,  une mise en danger de soi et d’autrui) qui n’étaient pas sans renvoyer à ce que j’ avais entendu lors des unités crées pour les patients alcooliques psychiatrisés dans les années 1960 : il n’y a pas de différence entre un homme qui boit et celui qui ne boit sauf que ce dernier boit… et quand il ne boit pas c‘est le meilleur des hommes ». C’est ce retour du même indifférent aux populations et à leurs modes de traitement social ou psy. qui m’a amené à considérer qu’il y avait une tache de différenciation à entreprendre.

2-3 La criminologie et tout particulièrement la psycho-criminologie (avec le tiret que l’oralité néglige) est l’étude systémique des pratiques infractionnelles et des vulnérabilités engendrées  (le stress post traumatique), révélées (par le rappel de situations antérieures jamais évoquées ou mises au travail), émergentes (par les inquiétudes suscitées (dont on ne sait quels destins elles vont avoir que la situation soit subie ou qu’elle soit agie : l’auto toxicité d’une agression agie).

pour un acteur qu’un énoncé juridique pénal définit dans un temps donné comme criminel ou délinquant ou victime de telles commissions,
pour les intervenants multiples, et tous les niveaux de recherches et d’instruction, d’intervention(les services de l’administration pénitentiaire, sanitaires et sociales) tant sur les plans diagnostic (l’exercice de la loi, l’exercice psy. et éducatif et social) d’orientation (qui renvoie à la juste peine au sens donné par  Beccaria) que de traitement (par la mise à disposition de l’ensemble des ressources et compétences médicales, thérapeutiques, éducatives et judiciaire)et de prévention ( quelle soit primaire ou de postvention).
pour une conception théorique qui met  fondamentalement en perspective les deux axes de la criminologie contemporaine: l’agressologie et la victimologie3.
Que des savoirs pluridisciplinaires y soient convoqués, cela va de soi : le criminel  comme construction juridico-sociale, se tenant dans ce complexe articulé, non réductible aux constructions des sciences criminelles ou du droit pénal ou aux réductions sociologiques.

2-4 Qu’entendons-nous par étude systémique ? Trois points :

cette proposition retrouve ce que la clinique psychologique définissait comme son objet référentiel heuristique propre : la référence à un sujet-en-situation (un projet/une personne, dont la notion référentielle de personnalité est une gélification instrumentale et instrumentable, par oblitération des conflits mis en scène et mise  en drame.)
et encore au-delà, ce qui spécifie l’objet propre d’une clinique criminologique, son  énoncé psycho-criminologique, le fait de considérer comme essentiel « l’agir en situation d’infraction », où se cherche et s’évanouit toute instance critique (qu’elle soit morale, éthique, ontologique ou déontologique), toute problématique conflictuelle inter et intra subjectiveii.La psychologie réaliste avait fondé la personnalité vue par le travers du comportement en négligeant ce en quoi celui-ci est essentiellement en situation ; l’invention de la personnalité psychologique puis plus tard criminelle, etc. a contribué à doté celles–ci d’une entité dévastatrice au lieu de n’y voir que la construction d’un drame dont le récit « significatif » offrait une compréhension partielle et partiale de la dramatisation d’une mise en scène. Plus encore et par la suite en dotant le récit de signification alors qu’il n’est qu’un autre contexte
En mettant en scène et de manière prioritaire la question critique du lien social et du vivre-ensemble, l’énoncé psycho-criminologique est d’abord confronté à la question de la responsabilité dans ses trois dimensions : judiciaire, psychologique et morale et se donne dans le même temps les possibilités de différencier celle-ci de la culpabilité, qu’elle soit juridique (l’intentionnalité) ou psychologique (ce qui se rapporte à la transgression et à ses avatars).

2-5 Posant l’agir en situation infractionnelle comme dimension essentielle d’un énoncé psycho-criminologique, (tant du coté de la personne agissant que de celle qui subit), l’analyse psycho-crimologique se donne la possibilité de différencier dans tout agir les dimensions internes de rupture ou de cyclicité qu’il implique donnant lieu à une compréhension différenciée.
sujet-agir-situation infractionnelle concevable dans une analyse bioscopique sérielle ( toutes choses se tiennent de leurs mises en contraste avec ce qui peut être rendu présent dans des récits pluriels sur soi), polymorphe (toute position incidentielle a son symétrique dans un autre registre d’existence donnant à apercevoir des parcours et des trajets) et séquentielle (en émergeant d’une impasse, l’agir en situation infractionnelle dit l’insistance d’une position intolérable et son essai de surmontement).
L’analyse sérielle,  que ce soit dans l’espace de l’agressologie ou de la victimologie, instruit les dynamiques continuité versus discontinuité (similarité et analogie)  ; l’analyse sérielle criminelle se pose en contrastes avec ce qui s’est joué ou se joue, en analogie ou équivalent dans des espaces non criminels ; l’analyse sérielle polymorphe vient insister sur la double série d’équivalences d’une logique intra délinquantielle ( le choix d’une option criminelle au lieu d’une autre) et extra délinquantielle (l’appel ou l’apostrophe faits à un tiers indépendant de l’espace judiciaire ), des transpositions/substitutions et fixations sur et par, un des éléments donateurs de la scène victimale (soi, l’autre, la réalité du fait, l’énoncé judiciaire).

2-6 En substituant au phénomène criminel la référence aux pratiques infractionnellesiii, c’est l’homme concret qui est donné en perspective sous l’angle d’un pour-autrui qui ne va pas de soi. La transposition simple au titre par exemple d’une « clinique pure » de l’analyse psychodiagnostique propre aux enjeux psychiatriques (psychopathologiques) néglige ce qui fait lien social (réciprocité et mutualité, dons et dettes, etc.) que des psychanalystes comme Frankle ont particulièrement éprouvé lors de leurs épreuves d’enfermement  sous un régime de terreurs. On peut le formuler ainsi : « si tu ne comptes plus pour toi au point de souhaiter disparaitre, sais-tu que quelqu’un compte sur toi pour tenir à lui même et aux autres ? »… comme l’on pourrait en trouver des traces dans l’Ethique de Spinoza, la Dialectique de Hegel ou… l’Utilitarisme de Bentham.
En insistant sur les pratiques infractionnelles, en symétrie l’insistance se fait sur les pratiques d’un soi victimé et en possibilité de sur victimisation, avec ses éventuelles conséquences dans les espaces infractionnels, de santé, d’errance sociale, de systématisation d’échecs, etc.

2-7 L’analyse sérielle criminelle polymorphe et séquentielle est à voir dans une triple dimension : de diagnostic, d’orientation et de traitement. L’analyse psycho-criminologique revendique de ne pas se confondre avec l’omni présence des idéologies thérapeutiques et en concevant ses dimensions dans quatre cliniques suppose que la question de l’évaluation ne soit jamais mise en retrait ou considérée comme la marque d’une absence d’éthique ou d’une imposture. Il y a par contre imposture à ne pas évaluer et à donner à penser que toute évaluation ne sert que de prétextes à des approches sécuritaires.

1 Politzer G.(1928) Critique des fondements de la psychologie. PUF. Paris. 4e édition 1974.

2 Villerbu L-M (2013) Les troubles de la personnalité dans l’actualité judiciaire, thérapeutique et éducative : régression théorique ou heuristique méthodologique ? in Coutanceau R.(2013) à paraitre, Troubles de la personnalité, Evaluation et prise en charge. Dunod.

3 Villerbu L-M, 2012 Les expertises psychologiques et psychiatrique au pied du mur, quand criminologie et victimologie s’en mêlent. Alger. 3e congrès international des neuro sciences. à paraitre. Voir également Institut de Victimologie.

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i On en conviendra l’usage de plus habituel du terme criminologie renvoie à une définition largement inspirée par le droit pénal et des sciences criminelles via la sociologie positive, celui d’étude du phénomène criminel. C’est la définition que nous avions retenue lors de la Conférence nationale de Criminologie sur la faisabilité d’un enseignement universitaire en France.

On sait les obstacles idéologiques et  les pressions corporatistes qui se sont élevés contre l’invention d’une section autonome « 75 » alors même que les sections liées aux religions comme le protestantisme ne posaient problème à personne, ne faisant aucunement enjeu ! On sait la mise en œuvre des rabaissements systématiques de ceux qui ont œuvré à cette tache au point qu’il a été possible de les identifier sous un vocable qui n’était pas sans rappeler le Syndrome d’Aliénation Parentale et que nous avons identifié comme le Syndrôme d’Aliénation Disciplinaire, nous référent aux travaux sur la complexité de E. Morin.
On sait l’absence de visée positive et réformatrice de ceux qui en vinrent à tirer profit de cette résistance, au moins de chercher à l’enterrer définitivement ou  tenter d’en faire une donnée nouvelle en recouvrant d’habits neufs les impasses dans lesquelles ils pouvaient se trouver… et cela dès l’annonce  de la mort de la section qu’ils avaient programmée. On sait moins combien certains des adversaires acharnés de la section en vinrent à s’auto définir criminologue, chercheur (e) en criminologie une fois le danger passé de ne plus se voir exister dans leurs domaines respectifs. Certes, il est vrai que certaines réticences sans aucune raison de bon sens n’étaient que des querelles de personnes et des produits d’enjeux antérieurs (dont les traces historiques sont aisément identifiables, faisant parti maintenant de notre histoire collective), et qu’ainsi se réalisaient sur le dos d’une criminologie officielle le sort de ceux-ci. Transformée en accessoires on sait la criminologie omni présente dans certaines officines privées, ou dans des diplômes sans attestation nationale comme on  sait l’appel à des criminologues étrangers ( ou à des criminologues ad hoc !) pour dire ce que serait l’apport de la criminologie (dans la prévention de la récidive !), on sait l’appel à des corps constitués en dehors de la criminologie pour donner leur avis sur les questions de récidive  (dangerosité, risques, par exemple) alors même que ces corps estiment que leur objet propre et leur service social ne les y prédisposent pas vraiment sinon pas du tout. Sans doute faudra-t-il encore attendre un plus grand état d’anarchie et de pressions estudiantines et professionnelles pour que la Cité Universitaire condescende à analyser des terrains d’exercices de formations et de recherches plus qu’elle ne s’égare dans des réformes dont l’idéalité ne fait que créer plus de distance, au titre d’un optimalisation auto satisfaisante.
Une paix sociale s’obtient dans le milieu universitaire à mettre au placard ce qui aurait été une des avancées les plus significatives d’une volonté politique de sortir d’un cloisonnement disciplinaire, de la fragmentation des pouvoirs disciplinaires et bien au-delà de la reconsidération des politiques depuis bien longtemps mises en œuvre à coups de convention, de regroupement de pôles, de constructions de sites d’excellence. Certes on a pu avancer encore qu’une section  de plus c’était encore une de trop dans un panel déjà bien rempli de disciplines. Mais ce que l’on ne dit pas c’est qu’une discipline est d’abord la volonté politique de promouvoir une certain visée des recherches et formations eu égard à ce qui du terrain fait problème, nonobstant l’ancienne demeure insatisfaisante de celles-ci, avec un objectif : aller plus loin et autrement, avec d’autres outils que ceux qui ont contribué à fonder et figer un état disciplinaire, sans  aucunement tenir compte des modifications structurelles contemporaines des besoins d’apprendre et des quêtes de savoir des populations différenciées d’enfant, d’adolescents et de jeunes adultes qui arrivent sur les marchés de la formation.

Sans doute aussi remarquera-t-on la confusion permanente des détracteurs de la criminologie, les criminocidaires, qui jouissent de la confusion habilement entretenue de la discipline et de la visée scientifique qu’elle porte, du jeu subtil d’une rhétorique formelle autorisant à passer des sciences criminelles à la criminologie, en équivalence et dans le plus grand des malentendus. Alors, au nom de son a-scientificité, éclatée en de multiples disciplines, (la fameuse chimère !) on a mis en avant sa complexité pour lui refuser le droit de constituer un objet propre, un avoir, donc de l’être !  Pour n’être qu’un appendice des deux disciplines sans doute les plus positives (au sens plus classique du terme) : le droit (pénal) et la sociologie (des pouvoirs). L’histoire de France de ses  disciplines est pleine de ces aléas. Il n’y a pas de refondation possible de l’intérieur.

ii Le réalisme psychologique avait fondé « de » la personnalité vue par le travers du comportement en négligeant ce en quoi celui-ci est essentiellement en situation ; l’invention de la personnalité psychologique puis plus tard criminelle, etc. a contribué à doter celles –ci d’une entité dévastatrice au lieu de n’y voir que la construction d’un drame dont le récit « significatif » offrait une compréhension partielle et partiale de la dramatisation d’une mise en scène. Plus encore et par la suite, en dotant le récit de significations alors qu’il n’est qu’un autre contexte, les réalismes psychologique ou psychanalytique n’ont fait que contribuer à donner vie et consistance à une supposée vie intérieure ou à des mythologiques dynamiques ( les complexes par exemple) au lieu de n’y entendre qu’un effet de proximité( cela me touche ou non) et la possibilité de faire sens ( et non de le dire).

iii Très clairement la référence à Bourdieu est ici une présence critique. Bourdieu P. (1972) Esquisse d’une théorie de la pratique. Droz. Genève-Paris.

Ce qu’engagent la criminologie et la profession criminologue : Une subversion des savoirs et des pratiques.

Le 21 décembre 2012.

Partie 1– Une criminologie du bout du monde : à l’ouest d’un hexagone.
Partie 2– De quelques conséquences dont il conviendra de parler par la suite.

A suivre…

Partie 3- Criminocides et criminoïdes. Les habits neufs de l’empereur.
Partie 4– A propos d’hérédité.
Partie 5
partie 6
Partie 7
Partie 8

Partie 1- Une criminologie du bout du monde : à l’ouest d’un hexagone. Une aventure à l’université de Rennes 2.

Originellement le travail sur la criminologie mis en œuvre à Rennes II dans le milieu des années 90 s’appelait  clinique criminologique. Cela s’inscrivait dans le droit fil de l’ouvrage écrit sur la psychologie où il était traité de clinique psychologique 1. Le renversement des champs clinique et psychologie prenait acte d’une mutation opérée au premier terme, clinique. Lire la suite

2ème Congrès International de Neurosciences.

20 Avril 2012

7- 8 avril 2012, Palais de la Culture, Alger.

LES SOINS  PSYCHOLOGIQUES ACTUELS, de la neurobiologie du comportement aux  TCCx.

Les expertises psychologiques et psychiatriques au pied du mur;  quand criminologie et victimologie s’en mêlent.

La révolution  criminologique dans les pratiques sociales judiciaires, du soin et de la santé.  Après avoir argumenté en quatre étapes le développement d’une pensée critique  criminologique, décomposant les pré carrés disciplinaires actuels, L-M Villerbu  en montre les incidences sur les suivis psychiatriques et thérapeutiques, au  delà de l’esprit partisan qui anime les criminocides  contemporains.

Un master de  criminologie est en cours de convention entre la Faculté des lettres et des arts d’Alger et la Gendarmerie nationale.
Télécharger le diaporama .PPT

Sur le diagnostique criminologique : Des questions insistantes.

L-M Villerbu(2003) Remarques critiques sur les notions de dangerosité et vulnérabilité psychiatrique et criminologique en psycho-criminologie. In Villerbu L-M, Ambrosi A., Gaillard B., Le Bas P., Dangerosité et Vulnérabilité en psycho-criminologie. L’Harmattan, Paris. Pp. :7-61

Extraits de texte :

« Le titre de l’ouvrage et des travaux qui l’ont conduit est bien que nous sommes dangereux de notre vulnérabilité… notre infortune conduit notre propre criminalité non pas par une relation causaliste mais parce que la disparition d’autrui comme échange et communication donne libre cours aux pulsions mortifères…. Lire la suite

Criminologie et diagnostiques : Un terrain en voie de reconversion.

De la nécessité de modéliser.

Diagnostic Orientation Traitement : le D.O.T., un tryptique dynamique dans l’approche psycho-criminologique

L‘approche méthodologique en psycho-criminologie implique que l’on se donne bien les moyens tant heuristiques que cliniques de distinguer les trois phases d’un processus typique : diagnostic, orientation, traitement. Ceci est d’autant plus important que la pratique diagnostique contemporaine  donne trop souvent l’impression d’être seulement issue des deux autres éléments du tryptique, sur le mode : nous ne définirions que ce que nous sommes en capacité de changer ou de contribuer à changer.  C’était d’ailleurs à partir de cette formule que Legrand du Saule définissait la non responsabilité pénale : sommes-nous en capacité d’apporter un changement. Si la réponse est non, alors la responsabilité ne peut être atténuée. Lire la suite

La psycho-criminologie, le crime et le criminel et les acteurs de la réaction sociale.

Approche clinique et épistémologique.

ICSH-GIS-CRIMSO, LM Villerbu,

Depuis quelques années le terme se généralise au point qu’il ne pose plus problème (Villerbu et al.2007). Cela n’a pas toujours été le cas. Il n’est pas cependant sans poser quelques questions de fond et soulever quelques ambigüités, tant sur le plan clinique qu’épistémologique et par retombée sur le plan déontologique.

1- Un trait d’union comme lieu de débats et engendrement de nouvelles connaissances.

Convenons en parcourant la littérature que la « chose » qui s’y réfère  use d’un terme dont l’orthographe varie. On pourrait se dire que cela tient au fait que le sens n’étant pas fixé il existe des écarts d’écriture (encore) sans importance. Ce serait oublier que le terme emporte avec lui un fond de mondes et de perspectives très différentes. Chaque mot est un mode écrivait M. Merleau-Ponty. En l’occurrence ici chaque orthographe ordonne des conceptions différentes. Que cela soit pensé ou non, de façon volontaire.

La juxtaposition de ces deux notions psychologie et criminologie en laisse une autre en arrière, qui pourtant fonde la réunion : le droit et notamment le droit pénal. Au point qu’il serait plus exact de dire que lorsque nous parlons de psycho-criminologie c’est l’histoire du droit en tant que science positive et de le psychologie comme référence à la subjectivité ( les sciences du psychisme) qui conjuguent leurs avancées pour produire un autre espace de pensée. Sans oublier que implicitement sous la référence de la psychologie et du droit, comme un autre écran de projection, les sciences sociologiques et les savoirs pratiques des hommes de terrain, aussi variés soient-ils, ne cessent de parcourir et de mettre en réseau des savoirs éparpillés, glanées au long des rencontres et des activités professionnelles.

La psychologie, au fur et à mesure de son développement ( de son intéressement à des champs différents), a pu s’approprier des champs connexes et en faire le terrain d’un exercice pour y développer formations, recherches et professionnalités. Il n’est pas sur que le rapport au droit qui rend compte de cette psycho-criminologie soit dans une position analogue. Le droit résiste à la psychologie entendu comme science du subjectif bien autrement qu’ont pu le faire l’enfant, la gérontologie, le travail, l’ergonomie ou la médecine. On doit prendre en considération qu’il y a là une résistance nouvelle qui doit entrainer le psychologue de la psychologie à ne pas annexer un terrain comme on annexe ou colonise un pays conquis. Il n’y a nul intérêt à faire de l’un l’annexe de l’autre et de continuer à élaborer sous forme de Coprésence passive, dans des frontières établie une fois pour toutes, les savoirs de l’un et de l’autre. Si la conjonction peut s’avérer riche de développements c’est à inclure les effets de la référence juridique dans le travail d’élaboration psychique et de considérer celle-ci comme un roc, au même titre que l’anatomie, chez Freud.

Si nous prenons le pari de distinguer le savoir acquis de ses méthodes nous sommes plus à même de concevoir les biais systématiques utilisés ou mis en œuvre pour faire de ceux là des éléments de transmissions d’une certaine forme de compréhension du savoir sur l’autre concret comme du savoir méthodologique de sa construction.( Labadie, 2004)

La criminologie du XIXe siècle est née dans les temps d’une science positive (Pirès, 1995) et d’un ordre social en train de se donner des paramètres d’évaluation, d’anticipation, de compter ses forces et ses fractures. Ce qui allait devenir une partie de la psychologie se présentait sous les traits des traités de bonnes et douteuses vertus, «  les faits de naissance » somatiques ou sociaux étaient considérés comme des faits de destin ou de prédestination. Une criminologie est née en même temps que la médecine légale au service du droit objectif, au service d’une société fondant dans le droit positif ses éléments essentiels. Cette criminologie ne connaissait pas la victime autrement que comme témoin à charge, éléments de preuve au cours d’un procès (Villerbu, 2009). Les effets de constitution ou d’hérédité se présentaient comme le seul terrain de développement des analyses. Le droit positif avait les interlocuteurs à sa mesure ; si bien que si même on ne savait pas vraiment ce que voulait dire les termes de démence( Roure,1993) le seul fait que le diagnostic se fasse sur le modèle médical et sur la base de maladies constatables universellement accréditait la croyance en la positivité d’une science conçue comme partenaire et complémentaire dans le cour d’un procès. On pourrait en dire la même chose de l’autre branche de la médecine publique émergente, qui plus tard donna l’hygiène publique et plus loin encore les analyses épidémiologiques. Que tout ne se fit pas sans difficultés les ouvrages et les presses d’époques peuvent en témoigner. Le paradigme de cette activité scientifique naissante s’organisa sur le paradigme du risque et son corrélat statique qu’est la dangerosité. La médecine aliéniste se construisant sur le modèle de la médecine somatique et de ses diagnostics, des technologiques en inventions permanentes pouvaient laisser augurer un développement semblable. L’invention des monomanies est jusqu’à un certain point parallèle à la création bien plus tardive de la psycho-somatique : quand le corps parle, quand l’acte fait signe d’une raison qui s’en s’ignorer assiste à son déchainement. Une monomanie sans délire, comme un soma qui ne répond pas aux lésions qu’on y attend par leurs causes entendues usuellement.

L‘impasse sur le subjectif ordonnait des chemins de description, de classement et des protocoles d’interventions. Le soin conçu sur le modèle médical ne pouvait qu’envahir les représentations et les exercices. C’est dans cette histoire de disciplines positives (tenant pour acquis que le savoir pouvait être indépendant de ses conditions d’émergence) non encore fixées mais dont les corps constitués étaient acquis que commença l’aventure contemporaine de la trace, de la recherche de la trace (d’abord criminalistique), métaphoriquement de l’empreinte, où qu’elle soit et de quelque lieu qu’elle émanât, du corps, de ses restes, de son histoire, criminologique. Un même parcours peut se repérer dans la naissance de l’inconscience puis de la psychanalyse.

Lorsque la trace se fit subtile, contestant les évidences apparentes une autre clinique naquit, celle dans laquelle nous nous situons. Elle situa délibérément un nouvel espace de pensée dans une construction qui ne cherchait plus son attestation dans la matérialité des faits mais dans leur interprétation. Dans cette longue phase de maturation qui entraina avec elle des remaniements du droit et des ses pratiques, la criminologie se scinda en deux orientations, sur des bases semblables : d’un coté la victimologie, de l’autre l’agressologie. Plus d’un siècle sépare ces deux temps. Comment devient-on agresseur se double quelque cent ans plus tard , de, comment devient-on victime.

La psycho-criminologie est le produit de ces subversions. Un rappel historique en donne un contenu particulier, significatif. Les travaux qui se référent ces réorientations peuvent aisément se diviser en deux types de constructions. Constructions par sommation ou cumuls de savoirs visant une exhaustivité : la psycho-criminologie ne serait qu’un espace de plus que l’on pourrait ajouter à ceux existant. C’est une dynamique de cumul de savoirs respectant la série des choses déjà construites. A l’examen mental devenu examen psychiatrique s’est adjoint l’examen médico-psychologique puis psychologique et celui-ci se serait diversifié en autant de champs d’études qu’il y a de champs de problèmes médico légaux ou socio légaux. Ainsi à coté de la psycho-histoire apparait la psychosexologie, la psychovictimologie, la psychocriminologie de l’acte. Le fil conducteur est apparent : aux spécialités existantes il faut en ajouter une autre et ce d’autant plus que le problème de la dangerosité se substitue à celui de la responsabilité. L’objet d’un examen quelqu’il soit n’est plus de définir un état mental mais une dynamique psychique à risque (amendable, curable ou non) et au delà de rendre compte d’un élément non contrôlable du corps social. La question de la déraison ne vise plus un acte infractionnel commis mais à venir ; la prévention de la réitération devient un problème de prédiction, i.e. un problème d’abord assurantiel où le probable tient lieu du juste, dont rendent bien compte les théories rationnelles de la délinquance et les préventions situationnelles dissuasives (Cusson, 2002,2003), comme également le paradigme de tolérance zéro.

Le second type de construction conduit ses réflexions sur une autre épistémè : tout savoir est historique et dépend de ses conditions d’obtention, de l’état professionnel, scientifique et technique d’un corps social. Concrètement le savoir sur le crime et sur le criminel que nous élaborons aujourd’hui du point de vue subjectif (l’intra-psychique et l’intersubjectif) et sociologique est le résultat d’une redistribution des savoirs et des corps professionnels, à l’interne comme l’externe de ceux ci. Le savoir sur le criminel comme personne et comme acteur, ne peut pas être le même aujourd’hui et avant que la fonction de magistrat ne se soit démultipliée en de nombreuses spécialités. L’accès multidisciplinaire et multiforme (Balier, 1988,2005) à la personne du criminel par l’invention ou la ré-invention de professions psy- et sociologiques, des statistiques comme des théories psychologiques (de la psychanalyse au cognitivisme en passant pas toutes les théories psycho-dynamiques et systémiques), des modes de suivi et de traitements (somatique,médical) ou d’accompagnements (psychologiques, éducatives, pénitentiaires…). Le savoir sur le psychisme émanant de thérapies à long terme de personnes souffrant de troubles névrotiques ou psychotiques a nécessairement modifié l’abord des psychismes de personnes dont le lieu de consultation est moins le cabinet ou l’hôpital que le lieu carcéral ou ambulatoire. On ne peut pas prendre en compte de la même manière une personne ayant subi une agression physique constatée que celle qui a eu le temps( !) de réélaborer psychiquement les avatars d’une éducation sur laquelle l’héritage parental, dans la construction de conjugalité, a laissé ses traces. Quand le recours à une modification de l’environnement prime sur le recours à un réaménagement interne ce ne sont pas seulement les théories qui doivent changer mais aussi les dispositifs d’intervention.

Tout cela conduit à penser la référence « psycho-criminologie » autrement que comme quelque chose de plus à ce qui existe déjà : une refondation est nécessaire, autrement dit une autre langue et d’autres protocoles, qu’ils soient d’analyses exploratoires ou d’interventions en vue d’un changement. Et mène à écarter toute écriture de cette référence en Psychologie criminologique (comme si le champ n’était qu’un adjectif), en Psychologie criminelle (qui donnerait à penser qu’il y en a une à coté d’une autre), en Psychologie du crime (Hesnard, 1963,comme si celui-ci pouvait être générique), en Psychocriminologie(Casoni, 2000, laquelle ne fait que traiter des apports psychanalytiques ou de psychologie dynamique et des applications cliniques en criminologie dans une voie très semblable aux travaux inaugurés par Lagache (1979), en Psychologie du meurtrier ( Guttmacher,1965, pour l’effet générique que cela inclut), en traité de Criminologie(Seelig,1956) ou en Psychiatrie criminelle (comme si celle-ci pouvait dire quelque chose du crime quand sa mission et son objet sont dans le soin et dans la frontière qui discrimine ceux qui sont de part et d’autre d’une ligne souvent ténue de libre disposition d’eux-mêmes).

Bien autre et plus proche de nos conceptions la position de JM Labadie(Labadie 1995, 2004) dans la Psychologie du criminel qui repose sur l’essentiel à dénoncer les illusions de toute puissance des interprétants en paraphrases1 du crime et du criminel, pour faire de celui-ci l’augure des crises de sens. Le vocable criminologie est le seul qui nous permette de ne pas mélanger les champs et de penser en termes de complexité ce qui n’aurait que trop tendance à se contaminer ou à faire objet de confabulation. On ne peut ici que rappeler le questionnement de A. Pires (Pires, 1995, Le Blanc et al, 2003) « le problème majeur réside moins dans la tension permanente entre un champ d’étude et une activité spéciale de connaissance que dans les glissements de sens et d’orientation que chacune des caractéristiques mêmes de cette activité est susceptible de produire…» . « En tant que activité spéciale de connaissance la criminologie avait quatre caractéristiques majeures et chacune d’elle porte les germes de ses propres apories et difficultés.

1- Le risque (substantialisation) de traiter le crime comme un simple fait ou un simple comportement. Oubliant qu’il renvoie à deux dimensions… un comportement ou une manière de faire… une qualification criminelle, ou une manière de définir.

2- vouloir soumettre le fonctionnement institutionnel du droit aux critères de la science… si l’on suit ce modèle la criminologie devient la morale clandestine du droit pénal moderne… la connaissance scientifique est réduite alors à une technologie du pouvoir.

3- une connaissance interdisciplinaire peut amener le criminologue à se perdre dans le projet multifactorialiste…

4- l’idée de vouloir produire une connaissance socialement utile ou de vouloir contribuer à une amélioration des conditions de vie en société peut aussi conduire à une sorte de praxis a-critique, servile ou marquée par le moralisme ».

On reconnaitra aisément deux typus sociologiques en œuvre : une sociologie de l’ordre une sociologie du conflit qui ne peuvent aller de soi et requiert tout comme la psychologie projetée sur cette activité de connaissance, une dimension éthique parallèlement à la dimension épistémologique. Autre manière de dire que c’est moins l’interdisciplinarité qui pose problème que la complexité à envisager pour en prendre les mesures.

Pour mette fin aux hypothèses constitutionnalistes et héréditaires, aux hypothèses d’un sujet pris en dehors de son environnement la solution a été de penser en terme de situation problème (Lagache 1979, Debuyst, 1995) et de penser l’auteur du crime en tant qu’un acteur social. Toute solution qui tient à la condition de penser cet acteur sous la forme ( les biais) dans laquelle il s’offre à voir à et à l’analyse. Ces formes sont les pratiques infractionnelles (Villerbu, 2008) qu’il peut avoir de lui-même, des autres et du monde, en tant que ces pratiques construisent, engendrent des mondes aux effets spéciaux, s’élaborent sur des dynamiques psychiques et sociétales dont les constructions fictives et de réalité ne peuvent être qu’inachevées à moins de devenir idéologiques. Ainsi la déviance (l’écart aux normes elles même instables) s’intègre à l’histoire et le comportement aux effets d’une histoire subjective et d’un temps donné. Ainsi, non seulement la norme peut s’interpréter mais également la valeur accordée aux normes. Les traces et leurs reconstitutions prennent sens de fictions révisables (Villerbu, Lebas, 2008). C’est de cette façon que s’est inventée la scène du crime au sens moderne du terme et qu’une psycho-criminologie est susceptible de se développer autrement que comme une application colonisatrice ou cumulative d’un savoir déjà là : non pas comme champ d’études mais comme activité de connaissance, incluant ou non (selon les orientations de connaissances souhaitées) les critères historiques des fondations antérieures, la dangerosité ou la responsabilité, dénouant les évidences entre des responsabilité/culpabilités juridiques et psychologiques : il n’y a d’acteur qu’à plusieurs et de jeu d’acteurs que d’offres et de scènes(Villerbu,2003, Villerbu Moulin,2008).

On conçoit que dans un tel contexte quand se pose la question de la juste peine, une fois la sanction élaborée, dans un cadre d’ individualisation ou de personnalisation de la peine puisse se poser en même temps plusieurs questions(Dréan Rivette,2005) : la peine qui évalue le scandale créé, la peine qui puisse être un étalon d’évaluation pour celui qui la reçoit, la peine qui fasse sens pour un public qui ne l’ignore plus et est rendu sensible aux conditions de sa sécurité (quel est l’impact du nombre de détenus suicidés et suicidant en incarcération ?), la peine qui aux yeux de celui-ci soit également une condition de réparation et d’amendement. On conçoit que dans un temps où il ne s’agit plus seulement de juger mais de suivre l’effectivité( les taux d’application des mesures énoncées et envisagées) d’une peine et son efficacité( quels sont les critères explicites et implicites de la non récidive )tous les moyens de changements et d’évaluation de ceux-ci puissent être mobilisés, jusqu’aux limites de la dignité humaine, du droit et de l’éthique. (Villerbu et al. 2009)
Si la psycho-criminologie n’est pas de se réduire à une clinique de l’acte, encore moins à une logique de l’acte ou à une criminologie de l’acte, si elle est bien une approche globale qui contient sa géographie heuristique propre, elle devient à même de permettre le développement de connaissances sectorielles inter et transdisciplinaires.

2- L’analyse psycho-criminologique, espaces d’études plurielles et surdéterminées.

Deux axes la spécifient dans une analyse détective (Villerbu et al, 2003) :

2- 1- un axe d’analyse détective à deux versants.

a- Le premier plus fréquemment identifié sous un angle criminalistique fait de la scène de crime son objet fondamental. A partir de celle-ci elle construit une infraction en la qualifiant, suivant des procédures déterminées, en même temps qu’elle élabore un auteur virtuel à travers les protocoles d’une enquête criminelle d’environnement. C’est avec la recherche de plus en plus sophistiquée de traces matérielles que s’est construite la scène de crime moderne. C’est avec l’apport des sciences physiques d’une part, des sciences psychiques plus tardivement que les indices ont fait sens et ceux-ci constructions. Que ce soit depuis les origines de la dactyloscopie, de l’anthropométrie criminelle, de la recherche de substances toxiques ou des restes dont les analyses d’ADN sont capables ou encore par le procédé du recouvrement (avec les moyes de l’informatique) la recherche de profils d’un coté, de modus operandi de l’autre.

b- C’est cet auteur virtuel qui est projeté sur un acteur réel à qui est imputé dans une logique d’attribution expérimentale ; il s’agit de percevoir et de concevoir ce qui en est fait dans une logique qui n’est pas celle des aveux mais de la probabilité. Ces derniers ne faisant plus qu’éléments qui demeurent à soumettre à l’analyse. C’est sur ce versant qu’apparaissent les stratégies de décriminalisation (St Yves, Landry 2004) de la part de l’acteur supposé auquel est imputée une situation, elles même objet d’une double analyse par vérification de probabilité d’une part, par « analyse psychologique et psycho pathologique implicite » d’autre part, que s’y trouvent mobilisés les savoir empiriques situationnels, les profils plus ou moins élaborés de criminels et de positions subjectives/objectives par rapport aux imputations. Une clinique judiciaire et de l’activité d’enquêteur parcourt cet ensemble dans lequel il est parfois fait appel à des psy-. Que ce soit en ce qui concerne des agresseurs présumé, des victimes présumés…. Nouveaux arrivés sur la scène du crime qui interviennent en symétrie et en parallèle, aux apports de la médecine légale et de ses praticiens. C’est aussi dans ce contexte que se situent dans d’autres cultures les criminologies attachées à l’enquête et aux modalités d’instruction des procès.

2-2- Le second est plus proche de l’activité traditionnelle du corps médical, aliénistes, psychiatres et plus tardivement psychologues.

Avec une particularité propre de notre système en ce qui concerne la démarche expertale. On ne peut négliger qu’une grande partie de nos connaissances viennent de la confusion entretenue entre l’élaboration de la culpabilité juridique (ce qui fait sanction et renvoie autrui à la dimension de l’altérité) et le prononcé de la peine (qui l’inscrit dans une économie pénale et sa philosophie, ipso facto).

a- L’histoire a souvent fait commencer l’examen mental avec l’article 64 de l’ancien code pénal. Les historiens ont pourtant montré l’ancienneté de la présence médicale bien plus tôt quand il s’agissait de responsabilité. Nous devons convenir que l’histoire moderne ( celle qui fait oublier les autres) commence avec l’invention d’institutions spécialisés et rendus obligatoires pour ceux dont la raison dérangée et reconnue comme telle exigeait des territoires spécifiques.(Ballet et al.1903 ; Casinelli,1939,Foucault,1973)
Dans ce second axe de la psycho-criminologique l’analyse détective se transforme en une analyse patho-biographique du lien social. Deux versants là encore : celui qui émarge au champ psychiatrique dynamique et celui qui émerge de la considération phénoménologique existentielle en psychiatrie (Binswanger, 1970,1971 ; de Jonckheere, 1998).

De l’histoire des sciences du psychisme retenons l’invention nosographique et sa capacité opératoire de discriminer la démence de ce qui ne l’est pas, d’abord avec les variations identifiables au départ et progressivement avec les découvertes du champ des psychoses et partant, de l’analyse en termes de structures. C’est dans cet espace que s’est posée la double question recouvrant en partie le champ criminologique. Responsabilité d’une part, dangerosité psychiatrique d’autre part sous deux angles : dangerosité pour soi et/ou pour autrui. Si la référence de la démence au moment des faits a toujours été affirmée notons les restrictions contemporaines quant à l’interprétation rendue possible par la définition de la structure. Le passage de l’une à l’autre est corrélative d’une autre analyse de responsabilité et a pu entrainer avec elle une autre dédifférenciation au risque d’une indifférenciation : l’existence d’une maladie mentale comme pouvant être en soi dangereuse (en tant que état) d’ une part, la reconnaissance d’une responsabilité même si dans le passé s’étaient faits connaitre des moments psychotiques. Convenons d’une autre analogie : en passant de la démence-état, limitant largement la responsabilité, à la psychose comme structure plus ou moins instable, le champ de la responsabilité pénale s’ouvre très largement.

Les instances politiques se servent des savoirs disponibles et de leurs vacillements idéologiques. Peu d’études sont réalisées sur cette dimension(les vacillements scientifiques et leur projection en vacillements identitaires et philosophiques) assimilée trop vite à la dimension de l’opinion et du populisme.

Dans ce cadre de pensée c’est le sens de la notion de structure qui a été ré ouverte : le risque pour soi et/ou pour autrui ne vient pas seulement de la structure (comme état) mais des décompensations de celle-ci lors d’un bouleversement psychique, lequel peut être d’ordre interne ou externe. Quant à la structure comme état statique elle est devenue la forme réifiée d’une réponse à une crise et le problème qui se pose devenant alors celui de son réaménagement.

Ce faisant une autre notion a pu se développer et elle est particulièrement incontournable en psycho-criminologie, celle de la vulnérabilité psychique et sociétale. Sans doute est-ce aussi dans ce contexte ré ouvert que peuvent prendre sens les protocoles actuariels et les analyses de tendances quand ils ne sont pas le seul étayage à un diagnostic dit criminologique(Villerbu, Moulin,2008) : lequel vise à la fois à discerner ce qui fait le risque encouru par tiers ou soi-même tant sur registre psychiatrique que sur un registre a- psychiatrique quand on veut désigner par là, soit les troubles de la personnalité, soit les décompensations actives sous forme de recours à des agirs infractionnels, sur quelque structure que ce soit.

  • en prenant en compte, cela va de soi dans cette perspective les changements d’environnements insupportables ou intolérables, suscitant des angoisses paniques ou des agonies psychiques et pour lesquelles faute de pouvoir risquer un changement de positions c’est l’environnement lui qui est objet d’attaque.
  • en prenant acte (Senon, 2009 ; Villerbu 2009) de ce que les méta-analyses cliniques ont rendu pertinent : le clinicien n’est guère plus armé qu’un autre pour anticiper à un moment T… d’une quelconque violence criminelle et de la forme qu’elle peut prendre. Une analyse récapitulative et interdisciplinaire, dans les temps d’une histoire et des territoires traversés peut être une clé à cette prévention qui ne sera pas une prédiction mais une analyse de configurations vulnérantes. On peut se dire dans le fond, que faute de pouvoir prédire, se mettent en place des mesures de prévention qui exigent des isolements, partiels ou totaux. Une grande partie de ces dispositifs a donc pour origine nos incompétences ; et pour celles-ci une certaine idée (datable, historique…) du travail clinique élaboré sur le modèle idéologique (car sorti de son champ, (cf. Althusser) du travail de cure, dans un milieu stérilisé, accréditant de façon douteuse les appartenances étroites de la personne du criminel et de la pathologie.

b- C’est le deuxième versant de ce second axe qui peut nous permettre un pas supplémentaire. A coté de la structure comme organisateur psychique, organisateur qui vient donner une posture singulière aux modus vivendi se profile ce qui est ou a été le lieu d’une décision subjective dans une histoire de vie(Binswanger) : l’axiome et son économie psychique élaborée sur une position de refus d’une condition. L’analyse existentielle des trajectoires de vie le rend apparent à travers l’économie qu’il développe et les étayages sur lesquels il repose. Défini comme une injonction normative organisée sur un équilibre des coûts et des profits, il engendre un mode propre tel qu’on peut le dire soumis à une forme d’idéal du moi, ou plus cliniquement aux instances narcissiques. Sa mise à mal fait la réactivité observée et rend compte des valeurs atteintes qui la provoquent. Si dans le contexte structural on peut évoquer les modes de décompensations par arrêts du fonctionnement des suppléances psychiques,( des modes de dérivation et de reconstruction des failles) ici on rendra compte des mêmes décompensations par la mise en impasse des valeurs sur lesquelles se tiennent le narcissisme et les valeurs idéalement porteuses, soutenues par un environnement dans lequel chacun est à même de trouver ce qui va légitimer aversions et attirances.

Le cadre environnemental retrouve ici sa valeur essentielle et toute atteinte qui lui est portée fragilise la stabilité axiomatique quand ne peut plus être tenu « l’équilibre » ou la bonne distance, entre ce que coûte la persistance d’un axiome et les profits qu’il engendre : lassitude psychique, fatigue chronique, perte de reconnaissance…. états dépressifs et encadrements contraignant à aller au-delà de qui est possible, somatisation, psychéisation, déviance, attaques et de là, les pratiques infractionnelles de soi, de l’autre et du monde.

3- L’analyse psycho-criminologique : des connaissances spécifiques, méthodes et organisation.

Si l’on admet que le choix du symptôme n’est ni totalement aléatoire ni totalement imprévisible il faut se donner les moyens d’en suivre les traces dans l’histoire d’un sujet donné et dans le racontage qu’il peut en faire, que son environnement peut en faire. Il y a des modes narratologiques spécifiques à la psycho-criminologie comme il y a des modes narratifs spécifiques à la médecine somatique ou à la dynamique thérapeutique.

C’est parce qu’il ne s’agit pas de co-morbidité mais d’analyse sérielle (Villerbu, 2003,2008) qu’il convient d’analyser et de mettre à jour les différentes trajectoires dimensionnelles à partir desquelles des « incidents » ont pu survenir. Bioscopie n’est pas anamnèse. Les trajectoires dimensionnelles, i.e. celles qui sont organisées dans l’interpellation d’un pouvoir (éducationnelle, sexuelle, professionnelle, conjugales, parentales, somatiques, judiciaires…) sont susceptibles de donner à voir les accidents de parcours et les modifications psychiques et d’environnements qui leur sont corollaires. C’est la traversée de ces trajectoires qui peut donner sens aux hypothèses sur le choix du symptôme et des situations qu’il mobilise.

Si l’on admet que toutes les interpellations s’équivalent, au plan psychique, on peut se donner les moyens de percevoir comment et pourquoi un sujet donné passe d’une interpellation à une autre, d’une adresse à une autre. En ce sens l’analyse est sérielle quand elle met en séries continuelles les moments les plus disparates ou hétérogène de la vie psychique et de ses incidences. On dira alors que l’analyse sérielle est polymorphe et que cette polymorphie est à rechercher à la fois dans un jeu intra et extra délinquantiel. Bien loin de transformer la délinquance en entité dont on suivrait la progression on pourra y voir les échecs à faire et être autrement et ce qui apparait comme un choix festif (Cusson, 2007), pourrait ne bien être que son envers. (La lecture des aventures judiciaires de Bonnie et Clyde écrite par la mère de l’un et la sœur de l’autre est à ce sujet particulièrement frappante).

Si l’on accepte de considérer que dans une série continue se tiennent des impasses ou des décompensations, apparaissent des formes discontinues, l’analyse sérielle polymorphe se fait séquentielle. Et toute séquence est alors un mode expérientiel d’une des possibilités implicites de l’axiome fondamental dans le cadre d’une structure particulière ou d’un syndrome identifiable. Ce que l’on peut définir comme le recours à l’agir étant une possibilité de sortir d’une impasse, avec des moyens qui dans le cas de pratiques infractionnelles ne font qu’entériner le plus souvent la situation de crise originaire, le milieu répondant à son tour et créant des situations autrement victimaires. (criminels par sentiments de culpabilité et/ou criminels faute d’avoir pu élaborer celle-ci  dans le temps de la construction psychique?) Ainsi des aménagements que l’on dit pervers et agis sur la personne d’un tiers et qui au départ ne supposent pas une organisation perverse sur le plan structural, ainsi des aménagements qui font paraitre les moments psychopathiques…. d’une psychopathie qui n’est pas nécessairement antisociale (Villerbu, 2001). L’analyse sérielle polymorphe et séquentielle est de fait à même de suivre, d’accompagner et parfois d’anticiper non pas un comportement mais les situations qui font basculer les économies psychiques.

Des mises en situations cliniques stratégiques peuvent de fait être développées. On connait le QUICPAS ( Ciavaldini, Balier,2000) et questionnaires analogues (Gravier et al. 2008), des épreuves projectives comme le MAPS de Shneidman, les épreuves d’arrangements d’images, des formes comme le TEF (Trajet et Espace fantastique), le Village Imaginaire (Villerbu, 1993) les jeux du « qu’en dit-on »… sont autant, parce se jouant dans un cadre spéculaire (de fait contrôlable), de contextes transférentiels de moments de témoignages d’une activité ( saisie pulsionnelle) des montages inconscients et relationnels, intersubjectif susceptibles de réflexivité. Si l’on tient pour acquis que ce n’est pas la demande qui prime mais l’offre de l’offre ( dans une double négativité, dire non à non !) qui suscite, le coin de table, ou le bout du chemin qui favorise les aventures transférentielles pour des populations limites, psychiatrisables dans un second temps, dont le recours à l’agir fait issue aux moments de catastrophes psychiques, ponctuels ou enkystés dans une histoire dont l’origine se perd sans jamais se retrouver, pour n’avoir pas à se retrouver.

Si le génogramme, loin d’être l’établissement d’un arbre généalogique, est saisi dans sa dimension projective, les cadavres dans les placards s’éveillent, d’une génération ou d’une autre sur les dimensions transgénérationnelles et bi-générationnelles.. Si le recours à l’acte, le « moment-acte » bien loin de remplir quelque fonction que ce soit, est pris dans sa dimension de langue (non pas un défaut de mentalisation mais une mentalisation qui emprunte d’autres chemins en gestaltisant des formes de présences envahissantes) il sera alors plus aisé de rassembler les éléments cliniques qui tantôt font de son recours l’élément déterminant d’une rupture ou bien l’élément essentiel d’un retour cyclique.

Tout une grammaire de l’agir se laisse esquisser qui loin de n’être qu’une logique métaphorique et pseudo scientifique de l’acte, ou son esthétisation dans une projection énigmatique (type d’énigme de l’acte, le crime et son énigme… parle-t-on d’énigme quand il s’agit de somatisation ?), préfigure l’avènement de la chose en instance de renversement. Toute une dimension pré thématique, multi factorielle, s’entre ouvre au regard et à l’écoute, qu’il sera plus aisé ensuite de donner à valider dans des conditions paramétriques et auto expérimentales.

Le clinicien, acceptant de se défaire d’une clinique intuitive, peut esquisser dans un protocole les régulations à venir. Il en va là comme de l’intime conviction du juge, quand délaissant sympathie et antipathie, identification à la victime ou à l’agresseur, un mode relationnel ou rapport factuel s’impose à lui dans ce qui sera nommé vérité judiciaire et à laquelle il se rend(en déposant les armes de du doute, intime, ou de la contestation, externe).

4- l’analyse psycho-criminologique, des temps et des modes d’intervention incorporant les dimensions psychiques en difficultés.

De ce qui précède on peut en déduire que la dangerosité prend son origine dans la vulnérabilité et qu’à moins de méconnaitre les effets d’histoire, le rapport agresseur agressé doit se concevoir dans une autre registre compréhensif, celui de victimant/victimé (Villerbu, 2004 ; 2008) permettant la réversibilité des places ou leur enkystement dans un monde réifié, chosifié instrumenté vs instrumentalisable tendant à l’a-subjectivité dans des situations et des moments spécifiques. Dit d’une autre manière, en psycho-criminologie, c’est le rapport victimant/victimé (Pignol, Villerbu, 2009) qui se tient au centre des prescriptions faites aux intervenants comme aux patients-condamnés ou en sursis de l’être ; et cela que ce soit du coté du dit agresseur et comme du coté du dit plaignant. C’est par cette entrée que peuvent se travailler les rapports de chacun aux responsabilités juridiques et psychologiques, aux culpabilités juridiques et psychologiques. L’accès à la dimension « empathie » (Zanna, Villerbu, 2009) qui implique la réversibilité des places est alors l’objet d’un travail psycho-pénal particulier.

Dispositifs diagnostics et dispositifs d’intervention en vue de changements doivent dans cette perspective être revus et corrigés de telle manière que les uns ne se fassent pas sans les autres. C’est sans doute là que se tient la différence essentielle entre une prise en compte de problèmes émargeant à la violence des actes infractionnels et ceux qui font de ceux-ci une question plus marginale. C’est à partir des failles narcissiques (les fractures du sentiment de continuité et de présence) qu’il devient nécessaire de donner à voir. C’est dans un donner à voir que peut s’opérer une re médiation opérante ; le donner à entendre, en référence au monde de la nuit et l’espace de « l’endos », de E. Minkowski est a priori trop et essentiellement persécutant et intrusif.

On peut distinguer deux grande catégories d’interventions : celles qui donnent accès à la dimension groupale et celles qui privilégient pour d’autres raisons la dimension duelle ; les unes et les autres ne pouvant s’entendre que dans un contexte de supervisions comme l’ont bien démontré es études et travaux de C. Balier ou de B. Savin, en France, de Mc Kibbben ou de J. Aubut au Québec….dans les travaux de langue française.

Dimensions groupales : qui sont elles mêmes distinguées en, d’ une part les groupes de paroles libres et thématisées, et d‘autre part coté les groupes de paroles s’apparentant davantage à une démarche psycho-cognitive (psycho-éducationnelle) de l’autre et supportant un apport de connaissances générales et spécifiques. Groupes psychopédagogiques sur la sexualité, comme sur la psychologie amoureuse et ses avatars. Groupes psycho-pédagogiques sur les stratégies usuelles de décriminalisation et de ré légitimation. Construction d’emplois du temps et de parcours susceptibles de donner à voir les moments éruptifs d’angoisse ou de dépression transformés en attaques. Lecture plurielle des attaques polymorphes faites à l’autre et à soi dans la reconnaissance des pouvoirs (médicaux, sociaux, judiciaires, psychologiques, de l’enfant, de la femme…du plus faible ou du plus fort, etc.…) qui y sont interpellés à leur insu.

Dimensions individuelles : guidance projective et commentaires des dits expertaux, lecture génogrammatique et constructions de génogrammes, bioscopies commentées et grapho-scénies permettant de donner à voir les recouvrements de comportements et de réaction, dans le temps et dans les différentes dimensions existentielles de développement et de déploiement de soi dans l’histoire. Travail de récapitulation des moments clés d’une semaine, travail psycho-criminologique sur l’intuition des ré émergences des poussées infractionnelles et de leur dérivation.

L’analyse psycho-criminologique dans ses interventions centrées sur le dit agresseur et/ ou condamné, sur le dit Victime… suppose que les recours à l’actes et les pratiques infractionnelles dans lesquels ils s’inscrivent oblige des dispositifs spécifiques, une reconstruction du cadre de soin ; et plus loin encore la différenciation entre ce qui est soin (médical) et veille : l’accompagnement psychologique(ou social). Elle suppose que les modes identitaires au travers lesquels ont lieu les recours à l’acte ne peuvent se suffire du cadre classique de la cure psychanalytique et des dispositifs mis en place pour des sujets à fondement névrotique ou psychotique. Parce que les recours plus ou moins massifs à l’acte, au-delà de tout effet de structures sont des modes des défenses d’un narcissisme gravement lésé. S’il est certes possible de construire, des différents dits et postures, des fonctionnements psychiques névrotiques, ou psychotiques, pervers ou psychopathiques ce ne sont pas les structures, en elles-mêmes, qui sont au cœur du problème : c’est ce en quoi elles deviennent défaillantes d’une attaque narcissique fondamentale suscitée par la bascule de l’axiome. Sans doute est-ce aussi pour cela que les histoires de vie ou les racontages de l’histoire intérieure de la vie du sujet font autant références à la précocité de malveillance (Villerbu, Laurent, 2009) et aux proximités des frontières de la vie et de la mort, du vivant et de l’inerte, du cri, du sang et du silence, de l’abandon….du voir et du contrôle du mouvement.

Ces questions et leur environnement scientifique et professionnel peuvent-elles être mises en études et recherches, formations et professionnalités si n’est pas créée, enfin (sic) une voie universitaire en criminologie ?

Novembre 2009

1 Prenons un exemple simple : dire de quelqu’un qu’il souffre d’érostratisme ne fait que qualifier une conduite par référence à un modèle (Erostrate) sans rien dire de plus qu’il cherche par ses actes à se faire qualifier et reconnaitre. Décrire n’est ni expliquer, ni comprendre mais tenir pour certain et assurée une certaine forme d’évaluation morale.

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